Reportage# 7. 2 / Un pays sans sommeil. République centrafricaine.

# 7. 2 / Un pays sans sommeil. République centrafricaine.

Pour mieux comprendre la situation politique et humanitaire actuelle de la République Centrafricaine. Entretien avec Adrienne Surprenant, photographe et journaliste du Collectif Myop.

Alors que vous étiez engagée dans votre travail sur la prise en charge des traumatismes psychologiques, l’actualité du pays vous a contrainte à produire un travail journalistique de « news »? 

En effet, mon travail a pris une autre tournure plus politique et ancrée dans l’actualité au moment des élections centrafricaines. Ce n’est pas moi qui ai choisi de lui donner une autre orientation. Pendant cet hiver de 2020/2021, juste avant les élections présidentielles, une coalition des groupes armés regroupant certains des groupes les plus puissants se sont unis pour descendre sur la capitale et faire en sorte que le président Faustin-Archange Touadéra ne soit pas réélu.

Pour situer le contexte il faut se rappeler qu’en 2013 une grosse coalition, baptisée Séléka, s’est formée dans le nord du pays. Ses hommes sont descendus sur la capitale et ont chassé le président François Bozizé qui était au pouvoir à l’époque. Ils ont commis des exactions sur les populations. Face à eux des groupes dits « d’autodéfense », les anti-Balaka, se sont constitués un peu partout dans le pays et eux aussi ont commis des exactions contre la population. Ce conflit, qui était à la base politique, a eu d’énormes répercussions entre les communautés chrétiennes/ animistes et musulmanes. Ensuite il se sont partagé le territoire parce qu’en fait ce n’était pas une lutte d’une communauté contre une autre, c’était une chasse, un combat pour s’approprier les ressources de la République Centrafricaine. À partir d’un certain moment tous ces groupes se sont divisé le territoire centrafricain et chacun avait sa part de mines, de ressources naturelles et de routes de transhumance où ils pouvaient taxer les éleveurs et les camions de commerce.

Pendant des années, la République Centrafricaine a été divisée comme ça. Le gouvernement contrôlait plus ou moins la région de Lobaye et la capitale Bangui et ce n’est qu’il y a deux ou trois ans que l’État, avec l’armée et la gendarmerie, a commencé à revenir dans les différentes villes du pays.

À la veille des élections, la Coalition des Patriotes pour le Changement (CPC) s’est formée et regroupait des ex-séléka et des anti-balaka dont les anciens groupes ennemis étaient devenus frères. Ils se sont ralliés derrière Bozizé (en costume gris sur la photographie ci-contre), le président qui avait été démis en 2013.  Sa candidature ayant été refusée par la Cour Constitutionnelle, il a pris le maquis avec le projet de déstabiliser complètement ces élections.

La grande différence avec la période de 2013/2014 c’est que la CPC en avançant ne commettait pas tant de crimes contre les populations locales. À l’époque il y a eu des tueries, des viols et des villages entièrement détruits. Là, la technique était plutôt d’avancer vers la capitale sans attaquer la population mais de se concentrer sur les positions militaires de l’État aidé par ses nouveaux alliés : des mercenaires et instructeurs russes et des forces armées Rwandaises. La CPC a en deux semaines pris le contrôle de nombreuses villes. Ils ont connu une avancée fulgurante et on s’attendait tous à ce qu’ils arrivent à Bangui avant les élections ou le jour des élections. Finalement non, ils ne sont arrivés aux portes de la ville que trois semaines plus tard mais ils ont été repoussés. Je pense qu’ils comptaient sur des soutiens de groupes éparpillés dans Bangui qui auraient pu les rejoindre. Pendant cette période, plein de gens ont été déplacés le long de tous les axes qui menaient à la capitale à cause des affrontements. La seule route d’approvisionnement terrestre était bloquée, plus aucun camion ne venait du Cameroun. Il n’y avait plus vraiment de nourriture sur les marchés, les produits de base et les médicaments commençaient à manquer. Bangui était isolée et mon travail bien sûr à ce moment-là a été de couvrir l’actualité. J’ai couvert le déplacement des populations et j’ai pu suivre les casques bleus sur certains axes qui relient Bangui à l’arrière-pays.  C’était aussi un moment où tous les journalistes ont vu leurs mouvements restreints par les nouvelles règles imposées par le gouvernement, soi-disant pour assurer notre sécurité mais plus probablement pour qu’on ne puisse montrer ce qui était en train de se dérouler partout dans les provinces.  Les populations ne fuyaient pas seulement la coalition de groupes armés mais surtout les affrontements entre les alliés du gouvernement et les groupes armés. Il y a eu encore des violences venant des deux bords sur les populations mais loin des yeux des journalistes; c’est toujours mieux pour cacher ce qui est en train de se passer.

Les conditions de travail des journalistes étaient-elles différentes en 2013/2014 ?

Je n’étais pas dans le pays en 2013/2014 mais, à l’époque, il n’y avait pas de structure d’État donc les journalistes venaient et travaillaient sans papiers officiels. C’était un autre monde. (La jeune photographe française de 26 ans  Camille Lepage trouva la mort  en mai 2014 lors d’une embuscade alors qu’elle était avec un groupe  des milices d’autodéfense antibalaka. NDLR)

Maintenant c’est assez facile d’obtenir la carte de presse pour pratiquer dans le pays mais, néanmoins, à partir du jour des élections, on ne pouvait plus se rendre dans l’arrière-pays. Moi j’ai pu me déplacer un peu plus que certains collègues parce que je suis canadienne et non française et que j’écris principalement en anglais. Je pense que la plupart de ce que j’ai produit a été ignoré, n’a pas été vu ou lu, donc ça m’a donné un petit moment de sursis. En plus pendant cette période électorale énormément de gens dans la population avaient peur de donner leur avis. Ils avaient peur d’être soupçonnés de supporter les rebelles. Pour avoir passé mon temps depuis 2017 à faire des entrevues avec des centrafricains, je voyais que le discours changeait, il était presque toujours le même, de plus en plus de gens refusaient de parler face aux médias. On sentait vraiment une crainte qui ne nous empêchait pas de faire notre boulot mais le compliquait. Ça nous forçait aussi à nous poser la question : comment est-ce qu’on protège les gens quand on réalise des reportages sur des sujets sensibles ? Est-ce qu’en posant telle question on met les gens en danger ou pas ? C’est un tout petit pays, les gens se connaissent, « si on parle, c’est sûr que notre voisin va l’entendre, il va le voir ». La situation était très sensible et elle l’est encore aujourd’hui.

Quelle est la position de la France désormais en Centrafrique ?

Depuis le départ en 2017 de la force Sangaris qui était censée protéger les populations civiles et désarmer les milices Séléka et anti-Balaka, la France est vraiment en train de se retirer face à la Russie, le nouvel allié stratégique du gouvernement centrafricain. C’est un sujet qui se ressent parmi la population parce qu’en fait des deux côtés il y a eu des campagnes de désinformation et d’attaques. Les journalistes français se sont retrouvés en porte-à-faux au milieu de tout ça, comme s’ils portaient la voix de la France, donc contre les russes. De fait, tous leurs propos étaient invalidés. Facebook avait même suspendu des comptes qui faisaient de la désinformation et qui étaient financés par les russes et par les français. C’était la première fois, si je ne me trompe pas, que Facebook suspendait autant de comptes des deux camps opposés dans un même pays.  C’est assez représentatif de la situation là-bas avec WhatsApp et Facebook sur lesquels tout et n’importe quoi circule. Les médias locaux sont dans des situations économiques tellement tendues qu’ils ont d’énormes difficultés à rester neutres. L’univers médiatique et d’information à travers les médias sociaux est très marqué dans un extrême ou dans un autre et il est très compliqué pour la population de trouver des informations vérifiées et crédibles.

Une des particularités relevées régulièrement lorsque l’on évoque ce pays est la présence d’une langue unique, parlée de tous, est-ce vraiment le cas ?

En République Centrafricaine, la langue officielle est le sango qui est parlée dans une grande partie du pays. Certains parlent aussi très bien le français mais le niveau d’éducation est très inégal entre la capitale et les provinces. Les conditions sociaux-économiques dans lesquelles vivent les gens et la situation de conflit permanent n’ont pas permis l’accès à l’école et à une éducation de base. Dans une grande partie du pays, ils prennent la personne qui a le plus haut niveau d’éducation pour donner des cours aux jeunes mais dans certains villages le plus haut niveau d’éducation n’est pas suffisant pour enseigner un français correct, l’histoire ou les mathématiques à toute une génération de centrafricains. Quand on travaille sur le terrain on a besoin d’un traducteur.

Dans plusieurs régions il y a plein de langues locales. Une partie de la population parle le foulbé, qui est la langue des peuls transhumants, principalement des éleveurs. C’est délicat de dire que toute le monde parle le sango en République Centrafricaine parce c’est quelque chose qui est souvent utilisé pour dire que « les gens qui sont venus apporter le conflit sont des étrangers, ce sont forcément des tchadiens, des soudanais mais pas des centrafricains parce que les vrais centrafricains ce sont ceux qui parlent le sango ». En fait il y a des gens qui depuis plusieurs générations habitent en Centrafrique et la traversent, comme les peuls qui ne parlent pas aussi bien le sango que d’autres mais qui restent de nationalité centrafricaine donc il faut quand même faire attention avec ça. Oui la langue principale c’est le sango mais ce n’est pas la seule.

Revenons sur la préparation des dernières élections, fin 2020, que se passait-il sur le terrain ?

À la fin de l’année 2020, ce que l’on voyait à Bangui c’était les préparatifs des élections et notamment les meetings politiques.  Au tout début il y avait même des meetings avec Bozizé, le président déchu qui avait formé une coalition de partis politiques d’opposition face à Touadéra. Ils ont fait un énorme meeting, ils se serraient tous la main. Deux semaines plus tard sa candidature avait été rejetée et il était en brousse.

Il y avait aussi les meetings de Touadéra, le président sortant, avec une énorme sécurité autour de lui, notamment des instructeurs russes qui n’avaient aucune étiquette sur leurs uniformes, la plupart du temps des personnes blanches non identifiées (photo ci-contre). Les journalistes ont aussi été amenés à aller à la Cour Constitutionnelle notamment pour la décision d’invalidation de la candidature de Bozizé (accusé d’assassinats, d’enlèvements et de tortures et visé par des sanctions de l’ONU pour son soutien de milices coupables de crimes de guerre et crimes contre l’humanité. NDLR). Cette invalidation a été l’étincelle qui a causé tous les troubles. À priori ce ne sont pas du tout des événements photogéniques mais on sentait une tension électrique dans la salle. On se posait la question : est-ce que la présidente de la Cour va réussir à rendre cette décision ? Est-ce qu’elle va devoir céder aux pressions ? Comment est-ce qu’elle va formuler sa décision ? On sentait que c’était hyper fébrile dans l’assemblée. Ensuite il y a eu des élections plutôt tranquilles, tout le monde est allé aux urnes. On s’attendait à des problèmes au cours de la journée mais à part quelques petits incidents plutôt classiques dans des élections il n’y a pas eu une de grenade de lancée, tout le monde a été voté tranquillement, le président aussi et on était tous là pour le photographier.

Finalement la coalition dirigée par Bozizé est arrivée à Bangui ?

Oui la CPC est arrivée à Bangui le 13 décembre. J’avais travaillé tous les jours depuis mon arrivée dans le pays j’étais un peu fatiguée. J’avais réussi à envoyer toutes les commandes, tous les articles et je m’étais dit : demain tranquille ! Journée de repos ! Et juste avant 6 heures du matin je commence à avoir un appel, deux appels, je reçois un message avec un texte en majuscule :  les rebelles sont en ville. Finalement la personne me téléphone, c’était un mototaxi qui m’appelle de temps en temps quand il se passe quelque chose, il me dit « ils sont là qu’est-ce que tu fais ? tu es où ? Est-ce que je viens te chercher ? ». Je refuse et lui dit de rester chez lui et de mettre sa famille en sécurité.

De là où j’habite, on entend les tirs, les affrontements. J’appelle d’autres personnes pour comprendre ce qu’il se passait. Je joins un chauffeur de taxi de confiance et d’autres journalistes. On décide d’essayer d’y aller, sachant que pendant les affrontements c’est hyper désordonné, l’armée centrafricaine n’est pas très attentive vis-à-vis des journalistes et il y a de fortes possibilités qu’il y ait un accident. Ce n’est pas une ligne de front comme dans certains pays où l’on peut s’approcher avec une escouade d’élite en qui on peut avoir confiance.

Nous arrivons sur un marché de l’une des sorties de la ville. Les étals du marché sont éparpillés par terre. Les gens ont fui et il y a des balles un peu partout sur le sol. Les casques bleus qui étaient là au moment où la coalition a attaqué ont réussi à faire front. Il n’est pas dit que l’armée toute seule aurait pu bloquer leur arrivée en ville.

Les Casques Bleus nous escortent pour nous montrer les cadavres des rebelles qu’ils ont tués mais beaucoup ont été retirés ou dissimulés par l’armée et les instructeurs russes. On s’entend dire : là il y avait un corps mais il n’est plus là, et là un autre, mais il n’est plus là, et on finit par en trouver un qui avait été tiré devant la maison du chef du village, un peu comme un chat qui apporte la souris morte devant la porte. Les gens avaient ce cadavre devant chez eux, selon ce qu’ils nous racontent, et ils l’ont juste emmené devant la maison du chef en mode « maintenant c’est à toi de gérer ça, nous on ne sait pas quoi faire ». On peut parler aussi avec des gens sur ce qu’ils ont vécu pendant la matinée et on voit sur le bord de la route une file d’une centaine de personnes qui sont en train de fuir les quartiers avec de petits baluchons sur la tête, les enfants attachés derrière le dos. Ils marchent vers le centre-ville et, dans un autre courant contraire, des jeunes hommes viennent voir ce qu’il s’est passé, constater les dégâts. On voit aussi encore les lignes de rebelles qui marchent dans la montagne. Les soldats se remettent à tirer pour leur faire signe de ne pas revenir et on nous dit de dégager, que le temps qui nous était alloué est terminé. Les affrontements ont ensuite un peu repris puis ça s’est stabilisé à Bangui.

Dans les différentes villes du pays les situations ont été très différentes notamment là où la coalition avait pu prendre le contrôle et régner pendant plusieurs semaines. Les armées se sont retirées très vite et sur certaines des routes ils y avaient continuellement des affrontements. En restant à Bangui on avait une vision très partielle de ce qui s’était passé, de l’ampleur de ce qui était arrivé dans les derniers mois en République Centrafricaine

Peut-on considérer que ces élections ont finalement été loyales ?

À priori les premiers résultats qui sont sortis ont dû être rectifiés mais Touadéra a toute de même gagné une bonne victoire. Je pense qu’il y a eu quelques tricheries ça et là mais l’opposition en se rapprochant de Bozizé s’est tiré une balle dans le pied, donc des gens qui auraient pu être bien positionnés, en s’associant à ses groupes rebelles, se sont attiré la colère de la population qui, après des années de conflit, souhaite la stabilité dans le pays. Ils voient d’autres pays africains voisins qui se développent même après des conflits. Ils voient la Côte d’ivoire, ils connaissent des gens qui y sont allés, ils voient le Sénégal. Ils en ont vraiment ras le bol de ces guerres et des ces batailles qui ne leur apportent rien. Ils ont envie de voir leur pays évoluer comme un pays normal.

Le bilan de Touadéra n’est pas non plus catastrophique. Il avait affaire à une situation pas facile après la présidente de transition Catherine Samba Panza. C’était le premier président élu qui n’arrive pas au pouvoir avec un coup d’état donc il avait une énorme charge pour apporter un sentiment d’unité dans un pays qui avait été déchiré par ce qu’il s’était passé en 2013/14. Il reste à voir s’il va bien se retirer après son deuxième mandat et dans quel état il va laisser le pays.

Donc Touadéra est un président légitime ?

Oui.

Outre les déplacements des populations à l’intérieur du pays, est-ce que la Centrafrique connait une forte émigration ?

Selon les chiffres que les Nations Unies et les ONG donnent depuis plusieurs années, une personne sur 4 vit en situation de déplacement que ce soit à l’intérieur du pays ou dans les pays frontaliers.

Énormément de gens ont été déplacés à plusieurs reprises et sont revenus, puis repartis, encore et encore, donc il y a des mouvements constants. Ce qui est intéressant à constater c’est que même si c’est un des pays les plus bas sur les indices de développement, les gens ne partent pas à l’étranger plus loin que les pays voisins comme la Côte d’Ivoire, le Cameroun ou le Tchad. Ceux qui partent et qui peuvent venir jusqu’en Europe ou tenter d’aller dans les pays du Maghreb pour travailler ne viennent pas des pays les plus pauvres, la route coute tellement cher et elle est tellement dangereuse ! Il faut déjà avoir un certain réseau pour pouvoir y aller. Ce n’est pas du tout le cas d’un centrafricain moyen. Même l’argent pour se payer le premier des passeurs n’est pas là. J’ai documenté l’arrivée de centrafricains dans un petit village du Cameroun qui a triplé de volume en deux jours au moment où un groupe armé s’est créé sur la frontière (celui des 3R (Retour-Réclamation-Réhabilitation) dirigé par le général auto-proclamé camerounais Abass Sidiki,NDLR). C’était vraiment les villageois camerounais qui avaient des liens de commerce et de famille avec eux qui les accueillaient, qui leur donnaient des terres, qui les aidaient à construire de petites cabanes et qui leur donnaient à manger pendant les premiers jours. Il y avait une énorme solidarité.

Les plus gros camps de réfugiés sont sur la frontière camerounaise et les centrafricains sont bloqués là.  Même pour aller ensuite étudier à Yaoundé ou à Douala, c’est compliqué.  D’autres vont avoir accès à des études à l’étranger, mais ils viennent des classes supérieures et aisées. Je pense qu’il y en a énormément qui voudraient, s’ils pouvaient, partir ailleurs, fuir, venir en France ou ailleurs mais ils n’ont même pas les moyens de commencer à rêver à ça.

Le pays a énormément de richesses et de ressources. Les gens aiment leurs terres, ils voudraient pouvoir vivre et évoluer dans leurs villages mais ils se font constamment chasser par la violence, les dangers, et par l’accaparement des ressources par des forces étrangères.

Quel est l’avenir de ce pays ?

S’il y a une chose qu’on apprend sur la République Centrafricaine c’est qu’on ne peut pas faire de prédictions et se dire qu’elles vont être réalistes, et plus encore parce que de nouveaux acteurs sont arrivés, des alliances plutôt anciennes sont en train d’être remaniées. Il y a tellement de facteurs qui sont des inconnus que c’est dur de prédire quoi que ce soit.

La situation est hyper complexe. Les gens ne cessent de partir et de revenir, c’est un poids énorme. Ils vivent dans l’insécurité sans jamais savoir ce que sera demain, et tout est un peu fait comme ça dans la société. Il y a plein de choses qui ne sont pas cultivées dans la Centrafrique parce que ce serait un investissement sur le long terme et on se dit : je ne vais pas planter tel genre d’arbre fruitier duquel je pourrai bénéficier dans dix ans, peut être, si d’ici là je n’ai pas dû fuir, ou si mon champ n’a pas été brulé. Donc on plante juste le manioc par exemple, parce que même si on brûle les feuilles, les racines sont encore sous terre donc on pourra en manger, quoi qu’il arrive. Cette peur constante influence la société de manière très dure et très profonde. Même si on revient chez soi on se dit qu’on va devoir peut-être repartir dans quatre mois, dans six mois, dans un an.

Adrienne Surprenant présente l’exposition Un pays sans sommeil du 22 janvier au 21 février 2022.

Mains d’Oeuvres, 1 rue Charles Garnier 93400 Saint-Ouen.
Avec le soutien de la SCAM pour la production du reportage et d’Action contre la Faim pour l’exposition.

Vernissage le 22 janvier à partir de 17 heures lors de l’événement Centrafrique : Scandale et coulisses (Événement artistique pluridisciplinaire questionnant l’histoire de la colonisation française et des enjeux contemporains).

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